dimanche 7 août 2016

La chèvre de Long




Lucie a 20 ans et souhaite profiter de son premier voyage humanitaire, pour mener un petit projet, avec l'argent que sa marraine, lui a confié.

Thien, le chef du village est interrogé, et c'est un petit garçon prénommé Long, qu'il propose d'aider.


Long


Long a 4 ans. Son papa né avec un retard mental très prononcé, a un visage très fermé. Sa maman souffre d'une surdité. Elle peut difficilement s'exprimer.


Papa de Long




Maman de Long



Long, ses parents et Thien le chef du village

     
Long vit dans la montagne, dans une maison reculée. 




Son papa s'occupe du buffle, que son frère lui a confié. Son salaire, c'est la bouse qu'il récupère comme engrais. 
 
La solidarité familiale essaie de fonctionner, mais la situation est bien compliquée, depuis que le grand père de Long est décédé.

5 Km séparent Long de l'école, mais c'est un RDV qu'il n'a jamais manqué. Le chemin qu'il emprunte seul, à travers la forêt, est un véritable danger. Mais il n'a pas le choix: L'école est le seul endroit où il peut parler et où il est certain de pouvoir manger.
 
Une visite à Long est programmée avant le déjeuner. A notre arrivée, nous sommes choqués par la misère constatée. Le papa, qui n'a jamais vu d'étrangers, ne sait pas gérer son émotivité. Il rentre et sort de la maison sans s'arrêter. 
 
Au milieu de la pièce, Long est prostré. Il n'ose plus bouger.




Nous sommes rassemblés autour d'une tasse de thé, lorsque la maman fait son entrée. Thien explique aux voisins qui viennent d'arriver, que nous souhaitons les aider.

Différentes idées sont évoquées, et nous pensons qu'offrir une chèvre, est une très bonne idée. C'est un animal dont il est facile de s'occuper et un petit élevage familial, pourra ainsi être lancé.

Nous redescendons chez Thien pour déjeuner et pendant que nous sommes attablés, il informe les villageois, que nous recherchons une chèvre, à acheter. 

Une famille vient d'arriver avec une chèvre qu'elle propose de céder. 









La chèvre vient d'avoir sa première portée et 5 ou 6 autres peuvent être espérées. Le prix au kilo est annoncé, et c'est à l'aide d'une balance à crochet, que s'effectuera la surprenante pesée.
Nos enfants sont intrigués !
Comment est-il possible de peser, avec un tel objet ?




Le prix de la bête vient d'être calculé, et Lucie est contrariée. Elle n'a que la moitié du budget demandé. Peu importe, l'histoire de Long nous a touchés et nous allons tous nous cotiser pour que ce projet puisse se réaliser. 

La famille de Long vient d'arriver, et à la vu de sa chèvre, le petit garçon est tout excité. Le regard fixé sur le sol, son papa frappe sa poitrine pour nous remercier. La maman ne peut pas parler mais un superbe sourire ne veut plus la quitter. 






Long avec sa nouvelle polaire.

 
Nous sommes attristés qu'autant de misère puisse exister, et nous souhaitons que la famille reparte, avec un gros sac d'engrais. Pour le papa, c'est trop d'émotions à gérer. 




Courbé sous ses 35 kg d’engrais, il part en courant vers la forêt. Nous finirons par le rattraper et par l'aider à porter le précieux sac qu'il ne veut plus lâcher.

Grâce aux vêtements que nous avions apportés, nous avons habillé cette famille pour plusieurs années. 




Le soleil va bientôt tomber, mais nous avons encore le temps de les raccompagner.
La chèvre n'était pas très disciplinée, mais Long a tenu à la guider tout au long du trajet. Entre ces deux là, une belle histoire a débuté. 

Thien nous a promis de veiller sur la chèvre et de s'assurer que la vente des futures portées puisse aider la famille de Long à sortir de son extrême pauvreté. 


Lucie et la chèvre


 La journée est terminée et il faut maintenant rentrer. Dans nos têtes, c'est bien compliqué. Comment quitter ce petit garçon que nous ne pourrons jamais oublier?


Long et sa maman




Il est 20h00 et les invités de Thien viennent d'arriver. 

Même si nos cœurs ont envie de pleurer, ce soir nous allons faire la fête, rire et chanter. 
Nos larmes attendront l’obscurité pour couler, en toute liberté.



La chèvre de Long par f1370740087

mercredi 3 août 2016

Matinée dans les rizières de Xin Chai.



Le soleil vient de se lever et la température atteint déjà 30°. A Xin Chai, tout le monde est réveillé et les rizières grouillent d'activité.








C'est à travers un petit sentier, que nous rejoignons la rizière, où nous allons travailler. 




Il faut parfois sauter à grandes enjambées et s’agripper pour ne pas tomber. Thien assure les passages  compliqués.


Thien (chef du village)

Nous commençons par faire des bottes avec les pousses que nous avons prélevées. Nous les transporterons ensuite, vers la parcelle où nous allons repiquer.
 



 


 


La rizière est enfin à nos pieds. 

Les plus motivés foncent tête baissée. D'autres, intimidés, hésitent à se lancer. Ils ont peur de s'enliser, de se faire piquer, grignoter les doigts de pieds ...

Au bout de quelques minutes, toutes les appréhensions sont dépassées, et nous sommes tous dans la boue, jusqu'aux mollets.






  


  






Le travail est physique, mais pas bien compliqué. 20 cm doivent séparer les lots de 3 pousses que nous devons planter. 
En fin de matinée, nous sommes courbaturés, mais heureux de les avoir aidés. Une pause bien méritée, est improvisée autour d'une tasse de thé.



 
Les femmes avec lesquelles nous avons travaillé, viennent de s'éclipser...



C'est avec de nouvelles coiffes et de belles vestes moirées, qu'elles reviendront nous remercier. 

 
  

 

Avant le déjeuner, nous avons une dernière mission à mener. Thien suggère de ne pas trop tarder. Le programme de notre journée est encore bien chargé...



Matinée dans les rizières par f1370740087

lundi 1 août 2016

Notre première soirée à Xin Chai



Thien est le chef du hameau de Xin Chai.
Sa famille a naturellement été désignée pour nous héberger.

Thien
 
La maison de Thien est simple, vide. 




Toute la richesse est concentrée dans les sacs de riz et d’engrais, entassés près de l'entrée. La maison n'a pas de porte, il n'y a rien à voler. 
Tous ceux qui passent à proximité, peuvent entrer se réchauffer ou discuter autour d'une tasse de thé. 


Les voisins


De fins matelas et des couvertures sont rassemblés près du foyer qui illumine l'obscurité. C'est le Comité Populaire qui les a apportés. 
A 12, nous serons bien serrés, dans ce petit espace enfumé. 




Malgré sa notoriété, Thien ne se sent pas à la hauteur de notre arrivée. Il se confond d'excuses face à sa pauvreté et au manque de confort qu'il va nous imposer. 

Son épouse Truong est elle aussi impressionnée. Elle n'a pas l'habitude d'accueillir autant d'invités. Pour la rassurer et la soulager, les autorités ont embauché un cuisiner réputé qu'elle n'aura qu'à seconder. 

Truong


C'est l'heure du dîner et les enfants du couple sont agités. 
Leurs petites mains se jettent sur chaque plat de viande et Thien très embarrassé, ne cesse de s'en excuser. 
Nous comprenons que notre repas est un festin auquel ils ne sont pas habitués. 
 
A la fin de la soirée, le cuisinier nous a demandé si nous étions satisfaits. Son diner étant plus que parfait, nous lui avons donné un 10, à l'unanimité.



Hiep ( fils de Thien et Truong)



Huy (fils de Thien et Truong)


Les patriarches viennent d'arriver. 


La grand mère


Pour nous honorer, la grand mère souhaite porter sa tenue de soirée. Elle est très belle avec la veste  qu'elle a confectionnée et les bijoux dont elle a hérités. 


  

Dans l'obscurité, le grand père l'observe avec beaucoup de fierté.


Le grand père


 Pour faire plus ample connaissance, Thien propose de se présenter. Sa voix a changé. Nous ressentons une étrange gravité dans les paroles qui sont prononcées.

Thien (à droite)


Il nous raconte qu'il avait 6 ans, quand il est tombé amoureux de la jolie Truong qui vit aujourd'hui à ses côtés. Leur histoire d'amour aurait put être d'une extrême simplicité, mais telle ne fut pas leur destinée. 
Quand il avait 9 ans, Thien fut marié avec une jeune fille de 12 ans qu'il n'avait jamais rencontrée. Un mariage arrangé dont il se serait bien passé. 
A 15 ans, Thien s'est rebellé et a exigé que son divorce soit prononcé. Ses parents ont cédé et payé la forte pénalité exigée par la famille déshonorée: 600 Kg de riz blanc, 160 kg de riz gluant, 3 cochons, 2 truies pleines et plusieurs millions de Dongs d'indemnité. 

Thien a retrouvé sa liberté mais de son côté Truong avait été fiancée et ses parents refusaient que son futur mariage soit déprogrammé. 
Malgré les difficultés, Thien et Truong ont continué à s'aimer en secret. 
Ils avaient 23 ans quand ils ont menacé de s'enfuir et de tout brûler si leur mariage n'était pas célébré. 

Leur volonté a fini par être exaucée et deux petits garçons sont nés, de cette union tant désirée.


Thien et Truong


Pendant ses jeunes années, Thien, étudiant infirmier, passait son temps libre à aider, les écoliers en difficulté. 
Sa générosité était appréciée et quand un nouveau chef de village dû être nommé, c'est lui qui fut désigné.

Thien est aujourd'hui un homme comblé et un chef respecté. Il gère son village avec beaucoup d'humanité et nous sommes heureux de l'avoir rencontré.

A son tour, il veut nous écouter, comprendre pourquoi nous souhaitons aider les enfants, à travers leur scolarité. Il nous demande si nous ne sommes pas découragés, face à l'ampleur des difficultés. Il  souhaite nos conseils pour sortir sa région de la pauvreté. Il veut nous entendre parler du bonheur de vivre dans un pays développé... 

Que répondre à ces questions compliquées ? 

Comment lui expliquer qu'il y a, ici, plus de sourires au mètre carré, que dans nos grandes cités ?

Comment lui parler de notre actualité et de ses incivilités, lui faire comprendre que notre société est d'une immense complexité et que le vrai bonheur est peut être dans la simplicité, que nous sommes venus chercher à ses côtés ?

Des voisins viennent d'arriver. 
Thien nous explique que le village n'a jamais accueilli d'étrangers et que chaque soir, un nouveau groupe va passer. 

Les invités souhaitent trinquer : A notre santé, à notre bonheur, à notre prospérité, à notre arrivée, à leur joie de nous rencontrer, à cette belle soirée, aux vêtements que nous avons apportés, aux sacs d’engrais que nous viendrons leur porter, à l'école que nous avons financée... 




 






La maison commence à tanguer !
Dur , dur... l'alcool de manioc a du mal à passer et c'est autour d'une tasse de thé que s’achèvera cette première soirée.

Chaque soir, un nouveau groupe est arrivé et nous avons trinqué, beaucoup chanté, et même parfois dansé, pour célébrer nos nouvelles amitiés. 

A la fin de cette première journée, notre appréhension est complètement tombée et c'est bien fatigués que sommes allés nous coucher. 

La nuit fut agitée !

Tous les villageois souhaitaient voir dormir les français, et c'est sur la pointe des pieds qu'ils ont, toute la nuit, défilés.

Dans la culture Nung'U, les femmes dorment généralement dans un coin de la maison et les hommes dans un autre. Nous avons donc demandé à Thien si le manque d'intimité, culturellement imposé, n'était pas trop compliqué à gérer. 
Il nous a répondu avec un grand sourire amusé, que lorsque toute la maisonnée était dans les bras de Morphée, tel un chat rusé, il rejoignait sa dulcinée qu'il emportait, loin des regards indiscrets. 

Il est 5h00. Le chant du coq vient de nous réveiller. 
Nous ne comprenons pas que la nuit soit déjà terminée.
Nous sommes bien fatigués et il va nous falloir du courage, pour nous laver à l'eau glacée, qui coule d'un petit robinet.




 
 Huong, Ha et Truong préparent le petit déjeuner : des crêpes et des nouilles sautées. 




Pas le temps de flemmarder, les villageois sont déjà en train de travailler et ils attendent notre arrivée.